Viviane Audet dévoile son nouvel album instrumental – Le piano et le torrent
Le spectacle-lancement aura lieu le 10 avril à la salle Claude-Léveillée de la Place des Arts
Viviane Audet partage son nouvel album instrumental piano-solo Le piano et le torrent ce vendredi 31 janvier. Cet album instrumental
dans la mouvance néo-classique est un récit pianistique de 15 pièces qui puise ses racines et son histoire au creux de ce petit village côtier de la Baie-des-Chaleurs qui l’a vu naître, grandir et devenir : Maria.
À la fois lumineux et surprenant, ce disque est de loin le projet le plus personnel et intime de la carrière de Viviane où elle se lance sans pudeur dans le torrent qui l’a submergé ces dernières années suite au départ d’êtres chers. Le piano et le torrent est un album conceptuel où chacune des pièces évoquent un lieu et un moment précis de ses jeunes à jours dans son village natal.
Accompagné du texte poétique Maria, ci-bas, qui fait office de boussole pour l’auditeur, Le piano et le torrent est comme une marche au petit matin sur le bord de la mer, chacune des pièces comme un petit coquillage qu’on laisse derrière pour ne pas perdre sa route. Créé dans une période de grands remous, Le piano et le torrent est un album de repères et d’enracinement. Comme une plongée franche dans la mer, il enveloppe et console.
YouTube : https://www.youtube.com/user/TheVivianeaudet
https://www.musiquelabe.com/vivianeaudet-pluslesilence
Le jour craque, quand le soleil frôle la ligne d’horizon. Tu pars, tu prends par la mer. Tu descends l’escalier qui sent le goudron. T’arrives en bas. C’est pas vraiment un raccourci, mais c’est pas vraiment grave. Tu ramasses un barlicoco, des églises, des morceaux de verres polis : les morceaux bleues les plus rares, les morceaux verts les plus communs. La mer est folle on dirait qu’elle va passer par-dessus toi. Elle passe par-dessus toi. Elle te rentre dedans la mer, tout le temps. Et toi tu t’inclines. Tout le temps.
C’est parfois le jour, c’est parfois la nuit l’été. Le p’tit bois en arrière de l’hôpital a toujours eu pour toi cette allure de forêt magique, l’endroit où tu manges des quatre-temps, où tu scratches tes genoux avec le sourire.
C’est immense, mais c’est petit.
Quelques rues plus bas, t’arrives à ce havre de joie qui prend l’allure d’une galerie blanche, entre la Rue des Loriots et la Rue des Colibris. Parce qu’ici les rues portent des noms d’oiseaux qui sont comme des petites cabanes dans ta tête quand tu te sens loin. Tu te répètes : Rue des Merles, Rue des Aigles, Rue des Tournepierres, Rue des Étourneaux, Rue des Malards, Rue des Mésanges. Et ça te fait du bien.
Tu prends par la promenade et t’arrives au Goéland. Le rose de la pierre contraste avec le bleu du reste. Il a sa statue à lui, le majestueux. Il est un peu le roi de toute façon.
Tu remontes par la Rue des Geais, pour rejoindre une partie de toi, petite et grande. La fois entre les deux. T’arrives à la balle au mur, mais elle n’est plus vraiment là. Il reste seulement le goût de la gomme balloune au raisin qui se passait de bouche en bouche la fois de la tague BBQ. Il reste ça.
Tu redescends la Rue des Chardonnerets et c’est là que tu le sens. Cet espace qui s’éloigne, cet endroit qui n’est plus totalement le même plus totalement chez toi. Les visages qui t’échappent, la distance du temps et la cruauté de la géographie. Il t’emporte. Le torrent. Il te passe sur le corps comme une grosse vague salée infinie. Et tu réalises ce qui n’avait pas encore pris une forme claire dans ta tête. Tu mets les mots ensembles dans un ordre normal et tu te les dis à voix basse : tu n’as plus de maison ici. Et tu réalises que la reine de la galerie n’est plus chez elle. Que Dolo est partie. Et tu pleures dans les marches vertes de son balcon d’en avant. Et tu l’entends qui te dit doucement « Viviane, plus le silence est grand, plus je t’entends, fille ».
La vague s’estompe du mieux qu’elle peut.
Tu repars.
Tu prends la 132 et tu tournes à gauche pour t’enfoncer dans ce qu’on dirait les montagnes, mais qui finalement est simplement un gros croche. Le tendre (route Droken) est là en haut de la côte. Mais les arbres ont poussé par dessus les trois petits garages. Tu cherches un contact visuel avec des traces connues, mais tout ce que tu vois c’est qu’ici on a laissé la nature faire. La nature. Lente.
Celle qui force à t’avouer vaincue.
Le vent vire. Le ciel devient noir. La mer grossit. Ça te guette. Tu connais. Tu sais ce qui gronde en haut. Va y avoir some squall. Tu pensais pouvoir le faire à temps, mais le ciel se déverse sur toi. Et ça sent un mélange de pluie, de lys et de pommes blanches. Et tu te sens moins seule. Mais tu ne l’étais pas de toute façon. Il faut repartir. Faire le chemin dans l’autre sens. Comme les autres fois t’arracher. Mais cette fois tu sais que ce que tu laisses derrière sur la pancarte verte est un ingrédient précieux de toi. Tu comprends que c’est elle qui t’habite. Qu’elle sera toujours ta maison. Maria. Et tu sais que si un jour tu reviens, les oiseaux te feront un passage.
La composition et l’interprétation sont signées Viviane Audet. La réalisation de l’album est de Viviane Audet et Ghyslain Luc Lavigne.
L’album sera présenté à L’Oblique le 30 janvier pour une séance d’écoute et une courte performance en format 5 à 7. Le spectacle-lancement aura lieu le 10 avril à 20h à la salle Claude-Léveillée de la Place des Arts. Les billets seront mis en vente dès le 6 février.
À propos
Viviane Audet, qui nous a d’abord éblouis comme comédienne au théâtre, à la télévision et au cinéma, mène depuis plus d’une décennie une impressionnante carrière de compositrice. En matière de musique à l’image, elle a entre autres signé celles des films Camion, Les rois Mongols, Arsenault et fils, Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles et La petite et le Vieux. On lui doit aussi celles des séries Temps de chien et Le monde Gabrielle Roy, ainsi que celles des documentaires Polytechnique : ce qu’il reste du 6 décembre et Lafortune en papier.
Également autrice-compositrice-interprète, Viviane Audet est membre de la formation folk Mentana, en plus de mener une carrière solo. Son 3e album de chansons en carrière, Les nuits avancent comme des camions blindés sur les filles (2023), s’est mérité maintes nominations.
Enfin, celle qui s’est illustrée avec son œuvre piano solo Les filles montagne, prépare un second récit pianistique néo-classique, Le piano et le torrent, qui paraîtra à l’aube de 2025.