Lettre ouverte du Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ) : Le droit à l’alimentation, au-delà de la charité
Le droit à l’alimentation, au-delà de la charité
La guignolée des médias bat actuellement son plein. Vous êtes nombreuses et nombreux à profiter de cette vague de solidarité médiatique pour tendre la main aux personnes plus démunies, pour qui ces denrées et fonds recueillis agiront comme un petit baume en prévision du temps des Fêtes qui approche.
Évidemment, ce petit geste fait du bien, à vous autant qu’à celles et ceux dont la dure réalité jouit, le temps d’une petite journée, d’une visibilité et d’une sympathie qui se fait pourtant si rare le reste de l’année.
C’est que l’aide alimentaire est aujourd’hui devenue une sorte de fatalité à laquelle on semble s’être collectivement accommodés. Autrefois développée en guise de solution temporaire à l’insécurité alimentaire, ce service s’est tranquillement institutionnalisé et pérennisé, venant camoufler l’échec de nos gouvernements pour enrayer une crise socioéconomique qui prend aujourd’hui une ampleur démesurée.
La guignolée des médias est une manifestation admirable de la générosité et de la solidarité collective, mais elle nous rappelle aussi, année après année, un constat profondément troublant : l’insécurité alimentaire ne cesse de croître, et les solutions mises de l’avant pour y répondre sont loin d’être suffisantes.
Des centaines de milliers de personnes, incluant des enfants, des aîné.e.s et des familles entières, dépendent encore de l’aide alimentaire pour se nourrir. Derrière ces chiffres se cachent des histoires de privation, d’injustice et de droits fondamentaux bafoués. Le droit à l’alimentation, pourtant inscrit dans des conventions internationales auxquelles le Canada et le Québec adhèrent, reste un concept abstrait, sans ancrage concret dans nos lois ou nos politiques publiques.
L’insécurité alimentaire n’est pas une fatalité, mais le résultat de choix politiques.
La précarité alimentaire découle d’un système qui maintient les inégalités sociales, ignore les besoins fondamentaux et continue de privilégier des approches caritatives plutôt que structurelles. Le recours systématique aux banques alimentaires, bien qu’essentiel à court terme, masque une réalité plus troublante : notre négligence collective à garantir un filet social robuste et des conditions de vie dignes pour toutes et tous.
Nous croyons fermement que la reconnaissance légale du droit à l’alimentation est la clé d’un véritable changement durable.
Reconnaître le droit à l’alimentation obligerait les gouvernements à garantir l’accès physique et économique à des aliments adéquats, à s’attaquer aux racines de l’exclusion sociale, à soutenir une production agroalimentaire plus durable et équitable et à propulser des initiatives locales qui redonnent autonomie et dignité aux communautés.
Le Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ) se mobilise pour rappeler que l’alimentation n’est pas un privilège, mais un droit humain fondamental. Nous ne pouvons plus accepter que des personnes aient à choisir entre se nourrir, se loger ou chauffer leur maison, particulièrement dans un contexte où l’inflation et la hausse du coût de la vie exacerbent les inégalités.
En cette période des Fêtes, nous appelons les décideurs politiques à aller au-delà de la charité et à poser des gestes concrets pour garantir à toutes et tous le droit à une alimentation adéquate et digne. Investir dans la justice alimentaire, c’est investir dans une société plus équitable, plus résiliente et plus humaine.
Il est temps d’agir. Pas pour soulager temporairement une crise, mais pour la résoudre. Définitivement.
Ensemble, revendiquons le droit à l’alimentation.
À propos du RCCQ
Le Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ) favorise l’émergence, la consolidation et la concertation des cuisines collectives sur l’ensemble du territoire québécois, tout en militant pour la reconnaissance du droit à l’alimentation. Les valeurs fondamentales du RCCQ sont la dignité, la solidarité, l’autonomie, la démocratie, ainsi que l’équité et la justice sociale.